Ma Mère Médée

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Maman elle est classe. C’est une des ces femmes sur lesquelles on aimerait écrire des romans. Des pièces de théâtre. Des scénarios même. Elle a la classe. Elle déchire sa race. C’est une meneuse, mais elle est soumise à papa. Papa la rend faible. Comme il a fait de nous tous des faibles. Dans sa proximité je me sens toujours faible. Il a cette capacité de te prendre tes forces. Sans ça, elle ne lui aurait jamais permis d’aller voir ailleurs.

-Polyxenos

Deux nouveaux élèves aux prénoms étranges arrivent aujourd’hui en classe et se présentent devant les élèves.

Eriopis, la fille, est désinvolte et arrogante tandis que Polyxenos, son frère, est timide et peu sûr de lui. Dès leurs premières répliques, on sent que leurs relations sont très tendues.

Ce sont des réfugiés mais pas n’importe lesquels : leurs parents sont les célèbres Médée et Jason. Il n’est pas facile d’avoir des parents de premier plan : pas de logement permanent, pas de vie familiale stable, une présence constante dans les médias.

C’est donc un point de vue inédit sur le mythe de Médée et Jason que les deux nouveaux élèves proposent dans leur présentation, celui des enfants du couple. Et le moins que l’on puisse dire est que leur vision est plutôt acide : leur père, Jason, est un héros qui n’a jamais de temps pour eux et qui au lieu de ça, a fondé une nouvelle famille sans eux à l’étranger. Obsédée par la vengeance, leur mère, Médée, s’effondre tragiquement et commet le crime le plus horrible qu’une mère puisse faire.

Note d’intention

Ainsi, au cours de la pièce, les spectateurs-élèves découvrent les relations compliquées qu’entretiennent les deux adolescents entre eux mais également avec leurs parents, la détresse de Médée face à sa rupture avec Jason.

A travers l’itinéraire de ces deux enfants ballotés entre différents pays, le texte pose aussi la question de l’intégration et du racisme en évitant de tomber dans le misérabilisme et la démagogie, et développe aussi une critique des médias et de la société du spectacle. La langue d’Holger Schober est volontairement contemporaine voire quotidienne afin d’actualiser le mythe et de le rendre accessible aux adolescents.

Cette pièce ne nécessite aucun décor ni technique car elle prend en compte la salle de classe et les élèves comme espace scénographique. Cette forme repose ainsi sur le jeu des comédiens, le texte et les interactions qui naissent au cours de la représentation avec les élèves.

Convaincu de la nécessité de présenter des formes théâtrales au sein-même des établissements scolaires, je suis parti à la recherche d’un texte traitant de l’adolescence en lisant des pièces allemandes appartenant au répertoire des «Klassenzimmerstücke», c’est-à-dire des textes écrits spécialement pour être joués dans des salles de classe.

«Ma Mère Médée» propose un point de vue inédit sur le mythe de Médée et Jason en donnant la parole à leurs enfants. Ces frère et sœur invitent les spectateurs à découvrir l’envers du mythe en dévoilant l’intimité de leur vie de famille ainsi que leurs problèmes d’adolescents.

Dans les versions de Sénèque ou d’Euripide, ils n’ont pas la parole, alors, ici, ils vont en profiter pour développer une logorrhée où ils évoquent pêle-mêle leur vie d’enfants de «stars», leurs déménagements constants, le divorce de leurs parents, leurs difficultés à créer des liens sociaux avec leurs camarades de classe....

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- Pourquoi elle tolère ça? Pourquoi elle l’a laissé partir?

- Parce qu’il voulait partir. Quand quelqu’un veut partir, on ne peut pas le retenir. Et à part ça elle a aussi sa fierté.



- Et qu’est ce qu’il en est de nous?



- Elle nous aime. Elle nous aimera toujours. On est toute sa vie, quoi qu’il arrive.



- Elle s’occupera toujours de nous.



- C’est clair.



- Elle nous aimera?



- Elle nous aime.



- Pourquoi je le ressens pas?



- Parce qu’elle est blessée, parce qu’elle est profondément meurtrie. Parce qu’elle saigne. Et putain, ce qu’elle en a perdu du sang. Mais elle est forte, elle n’est pas exsangue. Elle continue de se battre. Elle est une machine de guerre. Elle n’est pas de celle qu’on ratatine. Elle trouvera un truc.

extrait de Ma Mère Médée

Texte Holger Schober
Traduction Manon Pulver

Mise en scène Vladimir Steyaert
avec Charlotte Duran et Anthony Breurec

Spectacle tout public à partir de 12 ans destiné aux salles de classe de collèges et lycées

Production Compagnie Vladimir Steyaert

Ce projet a été subventionné par le Conseil Général de la Loire ainsi que par la Région Rhône-Alpes via le dispositf “Eureka”.

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